Caroline Gagné, artiste

Contretypes

Essai vidéographique et photogrammes
2014
Diffusion
2014, Mois Multi 15, VU PHOTO, Québec
​Commissaire : Alexis Desgagnés

Résumé
Caroline Gagné et François Lamontagne s’intéressent à la nature instable de la glace ainsi qu'à sa capacité à contenir et à faire perdurer la matière. Contretypes est la poursuite de cette réflexion à travers une recherche basée cette fois sur l'image. À l'origine du projet, il y a, d’un côté, des essais techniques cherchant à fixer l’état des choses, et, de l’autre, l’utilisation de matériaux pouvant rendre visible un changement d’état. Les images qui en résultent – à travers l’exploration des qualités « absorbantes » de la glace –, nous en révèlent le potentiel insoupçonné. Les techniques photographiques comme le photogramme, la numérisation et le contretype, juxtaposées à une recherche vidéo, viennent en effet mettre en œuvre les qualités singulières de la glace. À travers les approches combinées de Caroline Gagné et de François Lamontagne, c'est la révélation de ce « presque rien qui s'altère sans qu'on s'en aperçoive » qui s’opère.
- Viviane Paradis

DE GIVRE ET DE TEMPS
L'actualité de la photographie et de la vidéo expérimentale s’affirme une fois de plus et avec vigueur dans un projet qui pose une réflexion inédite sur les qualités de la «pixographie» (ou image numérique) à consigner le réel. En prolongement des recherches expérimentales que la photographie argentique avait autrefois codifiées dans le photogramme, l'exposition de Gagné et Lamontagne célèbre l'évanouissement secret de cet état de matière qu'est la glace dans ses aspects les plus imperceptibles et éphémères.

Une suite de six images d'abord, où paraissent des formes circulaires et dentelées sur fond noir. Celles-ci sont le résultat de numérisations inversées (en négatif) d'objets translucides et qui simulent l'impression résultant de photogrammes. Puis deux autres œuvres photographiques, en vue rapprochée, où l'on sent la formation de bulles, nodules et réseaux de motifs givrés qui évoquent inévitablement le chaos d'un microcosme primordial.

Enfin, une vidéo toute simple d'une ampoule emplie d'eau et qui, en gelant, fait se fissurer puis éclater le verre qui la contient. Cette œuvre est présentée sur une durée assez longue qui rend pour l'observateur toute tentative de détermination de l'infinité de micro-évènements ardue, voire impossible. Dans toute la boucle répétée de l'œuvre, l'impression créée est paradoxale: nous savons que l'état du verre change, qu'il se brise, mais nous n'en pouvons comprendre que le résultat final, de manière holistique.

Il faut ici l'énoncer, dès que ce travail s'applique à saisir la fragile fugacité du temps pour l'ancrer dans la peau diaphane du papier ou sur l'insaisissable spectre de l'écran, celui-ci nous demeure inaccessible; ne laissant, que le merveilleux cadavre, délicat et décharné d'un passé, décomposé.
- Sébastien Hudon